Résumé
Pour saisir l’opération du numérique dans les métiers de la communication nous allons observer ce que l’art lui même opère pour son propre objet. L’art comme technique, l’art comme jeu et mise en jeu des savoirs-faire. L’art lui-même traversé par le numérique, l’ayant anticipé et le projetant dans des pratiques communicantes.
Il s’agira, via cet ars/techné, de remettre en forme les « métiers de la communication ». Nous constaterons la qualité problématique des productions issus des pratiques amateures et nous en tiendrons compte pour dégager un possible « art de l’information et de la communication ».
Nous envisagerons enfin le transmédia pour résoudre les enjeux d’une société devenue une société de jeux où l’Histoire se construit avec des histoires. En apprendre les règles, en découvrir les qualités, pourra permettre de mieux comprendre le matériau numérique pour les métiers de la communication.
.1L’art de faire : le métier.
C’est par le biais de la création artistique que nous allons aborder la question des métiers de la communication à l’ère du numérique et de l’internet1. « Art » au sens de « technique », nous souvenant qu’ars a été la traduction latine de techné2 en grec et qu’il est donc question de manière de faire. En conséquence, il s’agira de dégager les qualités contemporaines d’un « art de faire information et communication » à l’ère du numérique et de l’internet. Nous nous proposons de procéder à une réévaluation des notions afférentes aux métiers de la communication de la même façon que l’art contemporain, depuis Marcel Duchamp, a pu reconsidérer le fait d’art. Notre questionnement tentera de répondre aux questions qui se posent quant à la qualité et la réalité de ce qui peut faire « art de la communication ».
Le vecteur « art » nous autorise à prendre quelques distances avec la scientificité attendue d’une méthode3 tout en étant autrement rigoureux. Il n’y a rien de plus faux que le dit « flou artistique ». Nous prenons au sérieux les fictions et les inventions poétiques dont nous reconnaissons la réalité et leur nécessité y compris pour la recherche scientifique4. C’est volontairement que nous laissons de côté les approches issues des Sciences de l’Information et de la Communication5 pour tenter, avec la création artistique, de dégager une épistémologie préservée de tout scientisme. Notre démonstration ne sera pas univoque, elle sera éprouvée par des allers et retours contradictoires de façon à pouvoir cerner ce mouvement dialectique (affirmation positive, négation négatrice puis, négation de la négation, afin de retrouver une affirmation possible) qui correspond au process de toute recherche conséquente.
Il s’agira de s’interroger, en tout premier lieu, sur la justesse des déterminismes qui sont posés par la problématique du colloque et de prendre en considération ce qui peut les remettre en cause. En un premier temps nous traiterons du métier, puis il sera question de comprendre ce qui fait la forme de l’art pour ensuite aborder le transmédia comme dispositif adapté aux enjeux contemporains d’un monde en recréation perpétuelle.
.1.1 Le métier d’art.
Commençons par le métier d’art et ce qui va faire la qualité d’une forme. Premièrement distinguons « le métier d’art » d’avec « les métiers d’art ». Notre référent est délibérément le singulier de l’art et non le pluriel de l’artisanat. En sa recherche fondamentale, l’art permet de découvrir ce qui est à l’œuvre dans une société, de façon critique, quand l’artisanat s’applique à assouvir les seuls besoins à travers les « arts et métiers ». Loin d’ignorer la beauté d’un moteur, le génie de l’ingénieur, le « mode d’existence des objets techniques »6 nous devons distinguer ce fondamental de la recherche artistique pour inventer, c’est-à-dire découvrir, ce qui est à l’œuvre aujourd’hui avec le matériau numérique et ne pas interférer avec une fonction autre que « l’art de l’art de faire ».
Deuxièmement, après avoir séparé l’art de l’artisanat, nous ne distinguerons pas l’art de la technique, ars/techné. C’est dans le faire technique qu’une forme d’art va trouver sa justesse. La technique est une contrainte pour l’art, c’est avec elle qu’il se forme. À la différence de l’artisanat qui utilise une technique pour une finalité précise, l’art met en pratique d’un ensemble technique qui vise un mode d’existence car : « L’art en vérité est un mode de la vie et pour cette raison, éventuellement, un mode de vie7. » Autrement dit par Robert Filliou, artiste du mouvement Fluxus : « L’art, c’est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art »8. C’est une manière de faire qui est une technique de soi9, pour soi et pour autrui via l’opération de la représentation. Ce faire de l’art est ce qui donne sens à la technique.
Mais le sens de l’objet d’art est équivoque en sa « communication ». C’est un objet sans véritable objet qui excède sa propre finalité. Sa fin est sans fin. Tout en étant un processus de fabrication d’objets, l’art qui nous occupe et que nous allons lier aux métiers de l’information et de la communication est une disposition d’esprit, une vision conceptuelle, qui produit des objets ou des actes difficilement réductibles aux qualités attendues. Nous parlerons alors de « mécanologie10 spirituelle » propre à la qualité artistique et qui se fabrique un « métier sans métier ».
Affirmons le d’emblée : en matière d’art, en matière de technique, il n’y a pas de métier qui tienne. L’histoire de l’art est l’histoire de la mise à l’épreuve du métier pour dégager des qualités d’art émancipatrices du métier comme savoir-faire. Le métier est une entrave à la pratique artistique qui se propose de découvrir des formes de connaissance, jamais figées dans leurs formes. Au risque de la méforme ou de la déforme. Ainsi Léonard de Vinci qui aura expérimenté avec « La cène » une technique fragilisant gravement son œuvre11. Plus près de nous, Jackson Pollock qui, cherchant sa voie dans l’héritage de la peinture surréaliste et moderne européenne, a su inventer la toute première peinture véritablement américaine en laissant tomber sa peinture sur la toile, dans un geste proche de l’abandon du métier de peintre. Il allait découvrir une peinture aux qualités insoupçonnées avec des conséquences importantes pour l’histoire de l’art.
Redisons-le : le métier est un problème pour l’art. Ce qui fait la fabrique de l’art, ars/techné, ce n’est pas tant le savoir-faire que l’interrogation sur le savoir-faire. Ce qui est poursuivi c’est un « art de l’art », non pas « l’art pour l’art » mais l’art par les moyens de l’art. Non pas, pour ce qui concerne notre problématique, « la communication pour la communication » mais la communication par les qualités d’une communication qui n’est pas dupe de son propre message12.
Au contraire du métier considéré comme savoir-faire, ce sont bien les outils, les artefacts fonctionnels, qui peuvent être qualifiés de métiers. Ainsi, le métier à tisser, métier emblématique de ce que nous décrivons ici et qui allait bouleverser les savoirs-faire des artisans tisserands dans l’Angleterre du début du XIXe siècle.
Ce métier-machine, se complexifiant aujourd’hui jusqu’à l’automatisation ou encore l’intelligence artificielle, n’a de cesse, dans son évolution technico-artistique, d’éliminer le savoir-faire de l’artisan. Le métier, tel que nous l’entendons, est donc une machine. Elle ordonne (met en ordre) une tâche à accomplir suivant un l’attendu d’un programme.
.1.2.L’internet, un métier à tisser.
Pour montrer l’avènement du métier numérique de l’art, c’est-à-dire des machines calculantes, nous allons évoquer un fait historique et un conte. Commençons par le fait historique : l’invention du métier à tisser qui a mis en péril les artisans tisserands dans l’Angleterre du début du XIXe siècle et qui vont se faire connaître sous le nom de « Luddites ». Une chanson exprime leur révolte :
Que le grand Ludd ait du mépris pour les Lois
Ne saurait être critiqué que par quiconque ne réfléchit pas un instant
Que la vile Imposture à elle seule fut la cause
Qui produisit ces effets malheureux.
Que la haute cesse d’opprimer les humbles
Et Ludd rengainera son épée conquérante,
Que ses griefs sur-le-champ se voient apaisés
Et la paix sera aussitôt restaurée.
Que les sages et les grands prêtent leur aide et conseil
Et ne retirent jamais leur assistance
Jusqu’à ce que l’ouvrage bien fini et au juste prix d’autrefois
Soit garanti par la Coutume et par la Loi.
Alors les Gens du Métier, cette dure bataille une fois gagnée,
Porteront leur art dans toute sa splendeur,
L’ouvrage bâclé et au rabais
Ne privera plus de pain de l’honnête travailleur13.
Ces « honnêtes travailleurs » auront brisé les machines à tisser pour tenter de conserver leur métier, leur savoir-faire. Aujourd’hui, un néo-luddisme s’oppose tout aussi violemment à la progression technique des machines, celle des ordinateurs14. Entre les deux métiers, celui qui est machine et celui qui est savoir-faire humain, il y a bien un conflit récurrent d’ordre anthropologique.
Intéressons-nous maintenant au conte d’Andersen, « Les habits neufs de l’Empereur » 15. La morale qui en découle habituellement dénonce l’imposture de deux artisans qui auront abusé de la crédulité d’un roi et de ses sujets16. Voici le résumé qu’en fait le docteur J.D. Borne17, spécialiste de ce qui est devenu depuis un symptôme clinique :
Il y a bien longtemps, vivait un empereur qui aimait tant les beaux vêtements qu’il dépensait toute sa fortune pour être bien habillé. Un jour, deux escrocs se prétendant maîtres tisserands déclarèrent qu’ils étaient capables de tisser la plus belle étoffe du monde. En outre, cette étoffe possédait une qualité unique : elle était invisible aux yeux des sots et des incapables. L’empereur décida donc de se faire tailler un nouveau costume. Les deux filous installèrent leurs métiers à tisser et firent semblant de travailler. Quelques jours plus tard, l’empereur voulut savoir si l’ouvrage avançait. Le Premier ministre, le grand chambellan puis les courtisans rendirent visite aux deux tisserands. Tous s’exclamèrent que cette étoffe était une véritable merveille. En effet, ils ne pouvaient être ni sots ni incapables ! L’empereur décida donc de porter ses nouveaux habits lors de la grande procession qui devait avoir lieu la semaine suivante. Tout le monde criait : « Comme les habits de l’empereur sont beaux ! ». Seul un enfant s’exclama : « Regardez, l’empereur est nu !18 »
Cette histoire dénonce l’imposture de deux artisans qui font croire à un art extra-ordinaire alors qu’ils n’ont aucun savoir-faire. Ils mettent à nu le roi en l’habillant d’illusions, le dépouillant de son argent et le couvrant de ridicule. Il y a manifestement tromperie sur la marchandise et sur les qualités des deux filous. Le conte ne laisse aucun doute à ce sujet : « Un jour arrivèrent deux escrocs, se faisant passer pour tisserands et se vantant de savoir tisser l’étoffe la plus splendide que l’on puisse imaginer. »19.
Proposons une autre lecture. Si, à première vue, l’objectif pour les deux pseudo-artisans est bien de gagner de l’argent sans en avoir les compétences, il nous semble juste de repérer dans le conte ce qui va différencier l’artisan de l’artiste. Il faut le reconnaître, nos deux compères sont bel et bien des artistes et c’est en cette qualité qu’il nous faut les admirer. L’opération qu’ils s’ingénient à mener à bien est de transformer l’artisanat en art comme on transforme le plomb en or, la valeur estimable en ce qui n’a pas de prix, l’imaginable en inimaginable. Le travail de la matière grise que l’art met en œuvre se réalise concrètement ici dans une performance avant la lettre20. Nos deux artisans sans savoir-faire, sont des artistes au métier bien réel, artistes par excellence, par l’excellence de l’opération conceptuelle qu’ils ont su mener à (presque) bien : faire jouer le virtuel dans la réalité et montrer qu’entre les deux, il y a du jeu, du rapport. Ces artistes avant la lettre (puisqu’il ne sont pas reconnus comme tels par l’auteur du conte), anticipent sur ce que l’art moderne entreprendra avec la destruction du métier et du savoir-faire issu des Beaux-Arts. L’ambition n’était pas des moindres : s’affranchir du poids des critères dominants et toucher au plus près cette cosa mentale21 chère aux artistes les plus exigeants afin de réaliser des œuvres qui font l’économie du labeur artisanal.
Avec art, nos deux visionnaires mettent en œuvre une mécanique autrement plus technique que celle qui consiste à tisser un vêtement au Roi. Cette technique est politique, éthique et est-éthique22. De la même façon que Pénélope, l’épouse esseulée d’Ulysse, en défaisant la nuit ce qu’elle avait tissé le jour, demeure fidèle à son mari en repoussant les avances des prétendants pressés de la posséder23, nos deux proto-artistes tiennent à distance le désir du roi en le montrant tel qu’il est :
Si, avons nous beau monter sur des eschasses, car sur des eschasses encores faut-il marcher de nos jambes. Et au plus eslevé throne du monde, si ne sommes assis que sus nostre cul24.
Considérant ce que nous venons d’observer avec l’avènement mécanique du métier à tisser et celui des deux compères du conte d’Andersen, nous pouvons mieux comprendre ce qu’il en est de cette autre machine à tisser qu’est l’internet. Ce métier « immatériel » là tisse une toile reliant les ordinateurs du monde entier et remet en question, y compris par ses effets économiques25, les métiers (au sens artisanal de savoir-faire) de l’information et de la communication. Ce métier numérique amplifie ce que son ancêtre en bois avait mis en œuvre : rapidité d’exécution, automatisation, programmation, massification des données et faculté de les copier à l’identique et à l’infini. Ce changement de paradigme26 redéfinit les qualités qui passent par la machine et qui rivalise avec les savoirs-faire humains. Comment les professionnels des métiers de la communication vont-ils comprendre ces qualités nouvelles ?
.1.3.Une formation continue pour l’information continue.
Nous avons employé le mot de « professionnel » pour indiquer une qualité spécifique et qui ferait la différence avec d’autres pratiques qualifiées d’ « amateures ». Là aussi, nous devons réajuster nos critères. Ce ne sont plus tant les qualités attachées à l’objet information/communication mais celles qui sont liées à son écosystème qui vont distinguer la bonne réalisation, le bon ouvrage. La qualité est surdéterminée par les valeurs liées à la mécanique opératoire d’un ensemble opérant, au risque d’entendre le bruit des machines supplanter le signal des humains…
Mais aussi : est professionnel celui qui développe des « Killer-Applications »27. Le professionnel est un « tueur »28. L’amateur, quant à lui, aime sans achever véritablement son objet, il le maintenant dans une situation de « violon d’Ingres » où, « peintre du dimanche », il pratique une activité qui excède les qualités professionnelles du travail. C’est un loisir, une activité de temps libre. Son exercice ne s’achève pas dans la réification de l’objet créé et transformé en marchandise comme le fait un certain art contemporain s’achevant dans le champ dominant du marché de l’art29 et détruisant ce que l’art peut être. Cette « destruction-créatrice »30, selon ce qu’à pu en observer Schumpeter pour le process capitaliste, pourrait être fatale à la qualité des œuvres professionnellement réalisées. Mais les amateurs veillent. Contaminant le professionnalisme, ils renouvellent les critères de qualités par la justesse de leurs pratiques et parviennent à éliminer la distinction amateur/professionnel. Il nous faut admettre cette requalification du professionnalisme selon les pratiques amateurs car : « Ce sont des professionnels qui ont construit le Titanic, et des amateurs l’Arche de Noé »31.
Le Do It Yourself32 apparu avec la contre-culture américaine des années 1970 retrouve également avec l’internet et le numérique un terrain propice à la créativité amateure. Tout un chacun, braconneur33 des produits de grande consommation, recrée des usages et redécouvre l’art de faire, l’ars/techné.
.2.Forme et informe.
Posons maintenant ceci : l’information est la traduction d’un fait mis en forme par un langage. Traduction/trahison : l’information est une informe, une forme impropre à rendre les faits. L’information est une représentation qui offre un autre sens que celui, premier, du fait rapporté. Ce hiatus nous intéresse pour le décalage qui existe entre le fait et ce qui en est fait. Il suffit de reconnaître dans l’amphibologie du langage34, les conséquences poétiques qui en découle inter-dits, entre les mots.
.2.1.Le mouvement courbe de l’entre-deux.
Si, comme le dit Paul Valéry : « le poème est une hésitation prolongée entre le son et le sens. »35, alors l’intelligible qui se transmet par la mise en forme, balance, sans jamais avoir la certitude de se fixer clairement, entre deux pôles, l’un qui est de l’ordre du sensible et l’autre du sensé. Mieux :
[…] il n’y a pas de forme, puisque la forme est de l’immobile et que la réalité est en mouvement. ce qui est réel, c’est le changement continuel de forme : la forme n’est qu’un instantané pris sur une transition36.
C’est dans ce moment transitionnel que nous transmettons nos formes informes, nos informations. Leur qualité dépendra de ce mouvement entre son et sens, entre bruit et signal, entre dits et contre-dits. L’information est donc un genre de forme immature car elle est fabriquée selon :
un postulat erroné [qui] veut qu’un homme soit bien défini, c’est-à-dire inébranlable dans ses idéaux, catégorique dans ses déclarations, assuré dans son idéologie, ferme dans ses goûts, responsable de ses paroles et de ses actes, installé une fois pour toutes dans sa manière d’être. Mais regardez bien comme un tel postulat est chimérique. Notre élément, c’est l’éternelle immaturité37.
Le numérique et l’internet accentuent cette observation de Gombrowicz. L’immaturité de l’informe, de l’information, loin de nous exposer à l’erreur, nous invite à ne pas nous achever dans la fixité d’un savoir-faire immuable. Ce qui fait l’adresse d’une information ne va pas droit mais courbe. Pourtant, la croyance dans le « droit chemin » du sens est tenace et laisse à penser que cette droiture est le plus court chemin vers la véracité d’un fait. Bruno Latour, scrutateur avisé des modernes, nous met en garde contre ce qu’il nomme le « Mauvais Génie de Double Clic » qui
a[vait] la prétention de parler droit. […] Quoi ? On irait de preuve en preuve et l’on transporterait sans chicanerie, sans chinoiserie, sans éloquence, sans agacerie, sans fleur de rhétorique, sans tambour ni trompette ce qu’on veut dire ? Il n’y aurait nulle rupture dans le raisonnement, nul hiatus dans l’expression, pas de tour et de détour, pas de déplacement impromptu, pas de métaphore surtout pas, pas de trope non plus (ces deux formes de la dérive, d’emportement, de déviation, de séduction) ? Bref, on parlerait littéralement ? On pourrait maintenir de paragraphe en paragraphe un chemin qui passerait de nécessité en nécessité, par simple translation, sans jamais sauter par aucune opération de TRADUCTION ? […] On parlerait sans détour de ce qui tombe, comme on le dit, « sous le sens » 38?
Il nous faut, en outre, affirmer que les qualités qui se dégagent de la mise en forme d’un sens sont elles-mêmes courbées car :
Au cœur de la qualité, il s’agit d’entretenir la mobilité de la qualification, pour en contrarier l’encroûtement. […] Nous voilà derechef renvoyés de l’être aux manières d’être, puis aux manières de ces manières à l’infini ; du faire aux façons de faire et, à l’infini, aux façons de ces façons, jusqu’au moment où nous seraient peut-être révélés la Façon de toutes les façons et la Manières de toutes les manières ! […] La manière de donner vaut mieux que les dons […] La façon de faire est infiniment plus que la chose faite […]39.
Nous avons coutume de dire : « l’art et la manière », il nous faut plutôt dire : « l’art est la manière ». Ce qui reste du faire, ce qui dure, c’est le mouvement gracieux d’un geste affranchi des lourdeurs de l’objet, lourdeurs d’un objectif. Beauté d’un geste qui invente la remise en forme possible de la création quand celle-ci, en crise, se trouve encroûtée dans un habitus qui en immobilise la pratique.
.2.2.Brut de formes.
Si aujourd’hui, selon Joseph Beuys, « chacun est un artiste »40, c’est parce que la reconnaissance des qualités artistiques peut s’inscrire dans le hors-champ de l’art reconnu comme tel. Ainsi l’Art Brut, inventé par Jean Dubuffet41 qui, dans L’homme du commun à l’ouvrage fait cet aveu :
Personnellement je m’intéresse peu à l’exceptionnel, en quelque domaine que ce soit. Mon aliment est le commun. Plus c’est banal, mieux cela fait mon affaire. Je ne me sens, heureusement, rien d’exceptionnel ; c’est le regard d’un homme tout à fait moyen et ordinaire que je veux dans mes tableaux retrouver, et c’est aussi sans ajouter aux simples moyens dont dispose la main d’un homme ordinaire – ses techniques rudimentaires de profane, je n’en veux pas d’autres, elles me paraissent suffire – que j’ai tenté de constitué d’amples et hautes fêtes. Les fêtes ont bien plus de prix quand, au lieu de recourir à des registres étrangers à notre vie quotidienne, elles se tiennent sur le propre terrain de celle-ci42.
Aujourd’hui, les hommes du commun sont à l’ouvrage sur l’internet, ils ont réalisé une encyclopédie dite « libre » faite par tout un chacun43. Sans avoir été déterminée par l’expertise scientifique le monde académique en reconnaît aujourd’hui l’excellence44. Ce « grand public » auteur, n’est pas seulement grand par son nombre, il l’est grâce au matériau numérique qui lui a permit d’avoir droit au chapitre. En particulier avec le principe dit de « neutralité de l’internet »45 qui actualise ce que Robert Filliou nomme « le principe d’équivalence » (bien fait, mal fait, pas fait) :
L’équivalence n’est pas l’égalité, une valeur ne se substitue pas à l’autre ; au contraire, les trois propositions se complètent et le « bien fait », le « mal fait » et le « pas fait » se manifestent, selon Filliou, comme un tout naturel et spontané.
[…]
Filliou formalise avec le principe « bien fait ≡ mal fait ≡ pas fait » le processus de la création dans la multitude de ses manifestations, à la fois matérielles et immatérielles46.
Le média numérique réalise de cette manière ce qu’on peut appeler une « médiocrité juste », celle du juste milieu dont La Bruyère ou Montaigne ont pu faire l’éloge : ni trop, ni trop peu : médiocre. Un « art sans qualité »47 se dégage alors, réalisé par qu’importe qui, artiste possiblement « génial et sans talents »48. Un art sans qualité d’art, des pratiques qui excèdent les disciplines attachées au seul art reconnu comme tel. Ainsi, lorsqu’en 1999 Linus Torvalds reçoit le 1er Prix, catégorie internet, du Festival d’art numérique « Ars Electronica » pour le système d’exploitation GNU/Linux dont il a réalisé le noyau49. Pour la première fois dans l’histoire de l’art, une machine, une œuvre non créée par un artiste se revendiquant comme tel, était considérée comme une œuvre d’art50. Le jury a su reconnaître la beauté du geste gracieux des milliers d’informaticiens qui ont contribué à la réalisation de ce système d’exploitation libre51.
.2.3.L’âge du faire ?
Problème : comment faire face au flux indistinct de formes, d’informes, d’informations ? Une tâche s’impose alors : mettre en forme la masse de données. De deux façons : automatiquement par des algorithmes ou manuellement52. L’art est ici celui du tri, réponse qui se veut pertinente au « déjà-là » du « ready-made » en ligne. Le travail ne consiste plus dans l’exercice d’un métier créatif mais dans la tâche administrative et gestionnaire des données. Mais peut-on se satisfaire du seul mode administratif ?
La possibilité d’un métier, d’un savoir-faire, après son moment critique de destruction par la machine, se fait, non pas en réaction nostalgique des métiers d’antan, mais dans le prolongement de cette évolution. Commencée au milieu du XIXe, elle s’est affirmée de façon iconoclaste au début du XXe pour s’accomplir en multimédias au XXIe. Nos modes d’existence sont formés par les artefacts que nous formons et c’est en tenant compte de ces nouvelles conditions d’exercice, qu’un Pierre Legendre qualifie d’ultra-modernes53, que nous allons maintenant envisager ce qui fait suite à l’Homo faber : l’Homo ludens54. Nous pourrons ainsi dégager un possible art de la communication avec de nouvelles conditions de fabrication où le faire se prolonge en faire jouer.
.3L’art de l’information et de la communication : le sens du jeu.
Cette masse communicante de données réticulaires créée par les machines connectées les unes aux autres a généré un éco-système. Un monde créé comme la création du monde dans lequel nous vivons et nos écrans, loin de faire écran, en sont l’antre. Entre notre présence et nos représentations il y a du jeu, un espace instable qui fait de notre monde à l’ère du numérique, un espace de jeu, un « univers de jeu »55.
Cette dernière partie nous permettra d’émettre une hypothèse sur ce qui est à l’œuvre dans ce monde informé par le numérique. Informé au sens, redisons-le, d’un savoir porté à la connaissance tout autant que d’une mise en forme structurante de nos modes de communication.
.3.1.Du jeu dans les faits.
En tout premier lieu, c’est avec le jeu vidéo que nous rencontrons cette alliance objective entre la machine calculante et la jouabilité :
Les jeux vidéo sont une des formes de [ce] rêve, une fantasmagorie qui se déploie non aux marges de la société, dans un ailleurs ou dans un avant, dans l’âge d’or du « tohu-bohu » et des mythes primordiaux, mais en plein cœur de la vie administrative : réactivation des forces mythiques dans le dispositif de l’informatique et du calcul. Les jeux vidéo sont de petites poussières de rêve par lesquelles le capitalisme se secoue de son grand sommeil, des choses qui sont des songes, branchées sur les machines à nombres56.
Du jeu, il nous faut en comprendre les deux acceptions. La première est : « une activité de loisirs d’ordre physique ou bien psychique, soumise à des règles conventionnelles, à laquelle on s’adonne pour se divertir, tirer du plaisir et de l’amusement »57. La deuxième est : « En mécanique, […] l’espace laissé entre deux pièces assemblées imparfaitement. Comme il est impossible de réaliser des pièces avec une géométrie parfaite, le jeu est une nécessité dans l’assemblage des éléments d’un mécanisme »58.
Cette « branloire pérenne »59 du monde, pour reprendre le mot de Montaigne, est la règle du jeu du monde tel qu’il est et tel qu’il va. Tout va bien, rien ne va plus ! Il n’est pas tant question de gagner ou de perdre que d’éprouver ce moment vital où se joue en nous et entre nous cet espace de joie, de jeu, de branle. Cette dimension anthropologique du jeu60 est pour la culture aussi importante que les œuvres d’art ou les inventions techniques et c’est la raison pour laquelle :
La culture sera toujours, en un sens, jouée, du fait d’un accord mutuel suivant des règles données. La véritable civilisation exige toujours et à tous points de vue le fair play et le fair play n’est pas autre chose que l’équivalent en termes ludiques, de la bonne foi. Le briseur de jeu brise la culture même61.
Ce qui se met en place aujourd’hui dans la culture devenue mondiale c’est une culture de jeu à dimension sociale. Nous passons du jeu de société à la société du jeu. Une société de jeux « grandeur nature » pour reprendre la terminologie des jeux de rôles où : « les joueurs incarnent physiquement un personnage dans un univers fictif. Les joueurs interprètent leur personnage par des interactions et des actions physiques, d’après des règles de jeu et l’arbitrage d’organisateurs »62.
Dans son « Manifeste pour un siècle ludique » Eric Zimmerman63, game-designer et entrepreneur, observe ce passage du siècle de l’information (XXe) au siècle ludique (XXIe) :
Le XXe siècle était le siècle de l’information.
La théorie des systèmes, les théories de la communication, la cybernétique, l’intelligence artificielle, l’informatique… Ces champs de recherche, qui ont pour la plupart émergé bien avant l’avènement de l’ordinateur, ont participé à la « révolution de l’information ». […]
Dans notre siècle ludique, l’information est devenue un jeu.
[…] Les réseaux digitaux sont flexibles et organiques.
Au cours des dernières décennies, l’information s’est ludifiée. Un des exemples originels est celui de Wikipedia. Wikipedia n’est pas un entrepôt de connaissances parfaitement ordonné. […] les utilisateurs sont aussi les experts, créant l’information ensemble tout en faisant évoluer le système informatif.
Le Siècle ludique est l’ère des jeux.
Quand l’information devient ludique, les expériences qui s’inspirent du jeu remplacent les média linéaires. L’expression médiatique et la culture, dans le Siècle ludique, sont de plus en plus systémiques, modulaires, modifiables et participatives. Les jeux sont une incarnation très directe de toutes ces caractéristiques.
De plus en plus, les gens vont consacrer leur temps de loisir, consommer de l’art, du design, du divertissement sous forme de jeux – ou au moins sous forme d’expériences qui ressembleront beaucoup à des jeux64.
Passage du « siècle de l’information » à celui où « l’information est devenue un jeu ». De la même façon que nous avons eu l’utilisation « sérieuse » du jeu pour la pédagogie avec les « serious games », nous avons désormais l’utilisation du jeu pour l’information avec les « news games »65 :
Nous entrons dans l’ère de la discussion et de l’échange en ligne pour transmettre l’information. Même si cet échange a lieu seulement dans les limites décidées par le game designer, ça fait une sacrée différence avec un discours linéaire, ou avec un article si on veut parler de journalisme. Dans ReConstruire Haïti, le jeu permet aux joueurs de comprendre certains problèmes compliqués à gérer pour le gouvernement. On s’est rendu compte, en se fondant sur notre analyse journalistique, que certaines décisions bénéfiques à court terme pouvaient avoir des effets négatifs à moyen terme. On n’a pas d’autre prétention que de faire comprendre au joueur la complexité de certains mécanismes, l’interactivité lui permet de mesurer les conséquences de ses choix66.
Cette ludification de l’information sert l’information, le jeu devient un moyen de l’information, mais il est également sa propre finalité. L’actualité est un éternel retour, l’Histoire est close depuis la globalisation du monde et l’information peut être considérée comme sa répétition diverse et divertissante67. Joués par l’Histoire dont nous n’avons pas la maîtrise, nous jouons à son actualité. Sommes les acteurs d’un « théâtre des opérations » où la fiction et la réalité se nourrissent mutuellement. L’information, in fine, serait le moyen, le médium, le média du jeu qui met en mouvement les storytellings du monde. Le jeu est la finalité sans fin d’une Histoire qui s’est achevée dans la modernité.
Si en droit, ce qu’on appelle « fiction juridique » est « un mensonge technique consacré par la nécessité »68, en matière d’information, la « fiction journalistique » est donc le moyen ars/techné de faire passer la réalité des faits. Cette réalité fictionnée s’inscrit en vrai dans la réalité car :
[…] la fiction procède certes à travers des leurres préattentionnels, mais son but n’est pas de nous leurrer, d’élaborer des semblants ou des illusions ; les leurres qu’elle élabore sont simplement le vecteur grâce auquel elle peut atteindre sa finalité véritable, qui est de nous engager dans une activité de modélisation69.
La forme que prend le monde, modélisé par le matériau numérique, est ainsi façonnée par le jeu, un trouble entre réalité et fiction. C’est un univers où les acteurs jouent sur tous les tableaux et ce n’est pas seulement en peinture, ce n’est pas seulement avec le multimédia, mais c’est à une dimension transmédia que nous avons affaire. S’articulent ici tous les supports possibles, tous les médias disponibles, pour organiser le monde, sa réalité, sa représentation, son jeu, ses histoires.
.3.2.Une communication transmédiatique.
La narration transmédia (en anglais, transmedia storytelling ) est une méthode de développement d’œuvres de fiction ou documentaires et de produits de divertissement nouvelle qui se caractérise par l’utilisation combinée de plusieurs médias pour développer des univers narratifs, des franchises, chaque média employé développant un contenu différent. De plus chaque contenu peut être appréhendé de manière indépendante, en général, et sont tous des points d’entrée dans l’univers transmédiatique de l’œuvre70.
Observé en 2002 et théorisé pour la première fois en 200371 par Henry Jenkins72, le transmédia réalise la convergence des contenus multimédia. Un récit va pouvoir utiliser tous les supports médiatiques possibles, y compris les médias non numériques, pour les articuler les uns aux autres en intelligence avec leurs spécificités et se réaliser ainsi de façon cohérente. L’émergence du transmédia est le résultat d’une crise culturelle et économique qui doit faire face à l’extrême difficulté de retenir l’attention d’un public sollicité par une multitude d’informations ou de divertissements. Le transmédia ce sont des histoires à l’infini qui s’inscrivent dans l’Histoire finie. Notre monde, entièrement découvert, « ready-made », trouve avec le transmedia storytelling un renouvellement, non seulement narratif mais existentiel. Il permet de jouer les apories, voire les catastrophes, d’une Histoire majuscule lorsque celle-ci est sous la seule responsabilité d’un Acteur dominant, d’un Auteur tout puissant. L’Auteur a disparu au profit des auteurs tout comme l’Histoire a disparu au profit des histoires car « donner un Auteur à un texte, c’est imposer à ce texte un cran d’arrêt, […] c’est fermer l’écriture »73, autrement dit, fermer l’histoire. L’Auteur est devenu pluriel, ce sont des auteurs qui, au centre d’une histoire jouée et rejouée via la réalité d’une fiction, permettent la poursuite d’une Histoire par sa prolongation plurielle.
Pour cette raison de jouabilité74, de ludification, le dispositif transmédia n’est pas seulement un storytelling, il est également un « storygaming »75. Il réalise par le jeu, un jeu trans-historique (et non « post-historique »), des histoires pour l’Histoire. Trans-historique car notre Histoire comme Une est constituée d’histoires communes : l’unicité du monde est faite d’une multitude d’histoires.
Cette transformation de l’Histoire en histoires suppose que les personnages qui participent à cette construction portent crédit à son caractère fictif. Ainsi, après l’ère du soupçon76 des XIXe et XXe siècles nous entrons aujourd’hui dans « l’ère du crédit ». Après l’avancée des Lumières qui se sont évertuées à éliminer la part d’ombre de ce qui constitue notre réalité (en décrédibilisant les mythes et les fables) nous avons l’impérieuse nécessité de porter, à nouveaux frais, crédit au jeu de la fiction. L’accomplissement scientifique de l’Histoire majuscule aura été un échec cuisant. Porter crédit aux histoires ne nie pas la réalité de l’Histoire, son historicité mais permet sa traversée à nouveau jouable, mi-rêve mi-raison, mi-fables mi-faits, mi-faux mi-vrai. Une réalité rejouée et qui articule les faits et ce qu’on en fait.
Prenons, par exemple, le projet transmedia Alt-Minds d’Eric Viennot77. Annoncée comme « La première fiction totale » ce projet a su engager l’action des participants jusqu’à faire disparaître la frontière entre fiction et réalité. Notamment grâce à sa dimension d’A.R.G78 qui a fait jouer l’histoire en « grandeur nature », c’est-à-dire dans le quotidien des joueurs.
.3.3.Du jeu entre les faits.
Le maillage entre réalité et fiction a pour conséquence la création d’une porosité entre ces deux notions, ce qui ne veut pas dire la disparition de la réalité au profit du fictif79. C’est une évolution de type anthropologique de nos modes d’existences rendus possibles par une matérialité dite « immatérielle ».
De la même façon que Marcel Duchamp a pu affirmer que « ce sont les regardeurs qui font le tableau »80, nous pouvons dire : « ce sont les informés qui font l’information ». Dans cette totalité cohérente créée par les dispositifs transmédia, les joueurs sont connaisseurs81 des faits historiques par le simple fait de leur « ontophanie numérique »82.
S’envoyer des messages, faire des achats en ligne, échanger sur Twitter, tout cela ne résonne plus pour nous comme des pratiques relevant d’une cyberespace, mais comme des pratiques relevant du même espace que l’espace du monde. Le terme « cyberespace », issu de la science-fiction, est déjà un concept daté et phénoménologiquement périmé, ancré dans la rêverie du virtuel et l’imaginaire métaphysique qu’elle porte. […]
Aujourd’hui, nous n’avons plus le sentiment d’être projetés dans des « mondes virtuels », mais plutôt de vivre avec des « interfaces numériques »83.
Le web-documentaire84 a été pour le journalisme la première possibilité de narration utilisant le multimédia. Mais ce qui nous intéresse ici ce n’est pas seulement le compte-rendu d’une information, c’est l’immersion active dans l’information quand le virtuel et le réel, l’écran et la terre ferme se nourrissent l’un l’autre. Avec le transmédia le monde s’articule à sa représentation. En conséquence, une « transmédialisation du monde » voit le jour et crée une méta-création, un méta-monde. Comme avec les mythes et les récits fondateurs de l’humanité, le transmedia va structurer l’existence et permettre de la comprendre et d’y être compris.
Dans ce jeu de l’actualité, dans ce branle déstabilisant des communications, l’informant et l’informé se racontent des histoires au delà du « faux semblant du vrai » comme du « vraisemblable du faux ». Ce hiatus entre faux et vrai ne pose pas de problème de crédibilité étant donné que « le faux est l’autre du vrai »85. Nous ne redécouvrons pas seulement la nécessité d’une mise en scène pour nos existences, nous redoublons la représentation par une « mise en scène, mise en scène » en affirmant « la forme de la forme » c’est-à-dire la bonne tenue qui fait tenir chacun avec tous car :
Une société n’est pas une foule anonyme, c’est une organisation construite par la culture, un agencement qui suppose la culture et qui, vue sous cet angle, « travaille, comme disait Freud, avec les mêmes moyens que l’individu ».
Cela veut dire que la société, qui est l’au-delà des individus, doit, à l’instar de l’individu, ressembler à l’individu, devenir image et concept. En d’autres termes, une société s’invente les moyens de parler, qui ne peuvent être que des moyens de fiction86.
La société contemporaine, traversée par le numérique, redécouvre ainsi avec le transmédia ses « moyens de parler » avec des « moyens de fictions » interactives.
Une anecdote pourra faire comprendre comment des journalistes ont pu croire en la réalité des faits d’une narration transmedia. La formation P.S.M.87 (Produits et Services Multimédia) de l’Université Franche-Comté à Montbéliard propose à ses étudiants en Master 1 la création de projets transmédias intitulés « projets Rhizome ». Parmi ceux de l’année scolaire 2013-14, le projet Paléo-Pablo88 qui raconte l’histoire d’une équipe de jeunes chercheurs en paléontologie recevant une caisse remplie de mystérieux ossements dont il s’agira de découvrir l’origine. Suite à un communiqué de presse paru dans l’Est-Républicain89, nos étudiants ont reçu la proposition d’un reportage télévisé de la part de journalistes de France 3. La lecture de l’article a pu leur laisser croire en la véracité de l’histoire transmédia et malgré le quiproquo de départ, une fois la réalité sue, les journalistes ont décidé de réaliser leur reportage90, passant du sujet scientifique initialement prévu à celui d’une création transmédia réalisée par des étudiants en multimédia.
En conclusion et pour circonscrire notre propos, nous pouvons dire que les professionnels de l’information et de la communication seraient bien avisés de porter crédit à ce qui se joue avec, non pas le numérique et le multimédia, mais cette totalité culturelle, le transmédia. L’envisager comme métier, outil médian et mécanique opératoire qui s’offre aux vocations professionnelles comme aux velléités amateures, les deux qualités s’entrecroisant. Dans ce moment charnière du début du XXIe siècle où tout semble en crise et où le chaos règne nous pouvons heureusement toujours dire : « Rien ne va plus, faites vos jeux !… ».
Antoine Moreau, octobre 2014, texte pour les Cahiers du RESIPROC n°3, Février 2016 « Le communicateur bousculé par le numérique. Quelles compétences à transmettre ? ». Colloque RESIPROC « Les métiers de la communication traversés par le numérique », 9-10 octobre 2014, Bruxelles. Copyleft : ce texte est libre, vous pouvez le copier, le diffuser et le modifier selon les termes de la Licence Art Libre https://artlibre.org
1 Il semblerait que notre choix d’interroger l’art pour le devenir des métiers de la communication soit d’actualité : un colloque en 2015 s’interrogera sur « les devenirs artistiques de l’information (Publics en résistance) », CARISM, IFP, Université Paris 2 (Centre d’analyse et de recherches interdisciplinaires sur les medias), 19/09/2014, http://ifp.u-paris2.fr/18091044/0/fiche___actualite/&RH=IFP_FR (page visitée le 22/09/14).
2 I. GOBRY, Le vocabulaire grec de la Philosophie, Ellipses, Paris, 2000, p. 128.
3 P. FEYERABEND, Contre la méthode, Esquisse d’une théorie anarchiste de la connaissance, Points, Le Seuil, 1988.
4 F. AÏT-TOUATI, Contes de la Lune. Essai sur la fiction et la science modernes, Paris, Gallimard, 2011
5 Ainsi l’analyse pertinente de B. MIÈGE, « Eclairages (en guise de préface) », in Lafon Benoit (coord.), Supplément, Journalisme et questions sociétales au prisme des industries culturelles, Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n° 12/3, 2011, p. 3-9, mis en ligne le 27 janvier 2012, http://lesenjeux.u-grenoble3.fr/2011-supplement/Miege/home.html (page visitée le 07/06/14).
6 G. SIMONDON, Du mode d’existence des objets techniques, Aubier, Paris, 2012.
7 M. HENRY, Voir l’invisible. Sur Kandinsky, PUF, Paris, 2005, p. 209.
8 R. FILLIOU, R. MARTEL, J. DONGUY, L’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art, Les presses du réel, 2003.
9 P. HADOT, Exercices spirituels et philosophie antique, Albin Michel, 1993, 2002.
10 Nous reprenons le mot employé par Gilbert Simondon pour ses « Entretiens sur la mécanologie ». Transcription de l’entrevue filmée par Vincent Bontems : http://monoskop.org/images/4/48/Simondon_Gilbert_Le_Moyne_Jean_1968_2009_Entretien_sur_la_mecanologie.pdf Vidéos : http://www.youtube.com/watch?v=VLkjI8U5PoQ (pages visitées le 27/07/2014). « Mécanologie spirituelle » veut dire la faculté de précision dans l’élaboration de concepts, fictions et toutes représentations avec art et technique. Y compris, nous le verrons plus loin, lorsqu’il s’agit d’ « art brut ».
11 « La Cène (Léonard de Vinci) » https://fr.wikipedia.org/wiki/La_C%C3%A8ne_%28L%C3%A9onard_de_Vinci%29#Technique (page visitée le 2707/14).
12 M. Mc LUHAN, Pour comprendre les média, 1964-1968, Seuil, pp. 25-40.
13 Texte dans H.O. 42.119 (sur l’air de Poor Jack) [H.O. Pour Home Office, équivalent du ministère de l’Intérieur]. Cité par E. P. THOMPSON, La Formation de la Classe Ouvrière Anglaise, trad. Gilles Dauvé, Mireille Golaszewski et Marie-Noëlle Thibault, Paris, Ed. Le Seuil / Gallimard [Coll. Hautes Etudes], 1988, chap. « Une armée de justiciers. La révolte des luddites contre la machine industrielle », p.74 dans l’édition pirate en ligne http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/Une_armee_de_ju.ers_vol1-A4.pdf (page visitée le 12/09/14).
14 Par exemple : T. KACZYNSKI, La Société industrielle et son avenir, éditions de l’Encyclopédie des Nuisances, Paris, 1998. https://fr.wikisource.org/wiki/La_Soci%C3%A9t%C3%A9_industrielle_et_son_avenir (page visitée le 12/09/14).
15 H. C. ANDERSEN,Les Habits neufs de l’Empereur, Fernand Nathan, 2006.
16 Par exemple, le discours du conseiller fédéral, C. BLOCHER, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de la « Foire d’échantillons de Bâle » le 18/02/2005, « À propos d’empereurs et d’enfants – éloge de l’examen critique » http://www.ejpd.admin.ch/ejpd/fr/home/dokumentation/red/archiv/reden_christoph_blocher/2005/2005-02-18.html (page visitée le 13/09/14).
17 J.D. BORN, Docteur en Médecine, Chirurgie et Accouchements de l’Université de Liège, Médecin Spécialiste en Neurochirurgie et Chef du service de Neurochirurgie de l’Hôpital de la Citadelle.
18 J. D. BORN, « Le syndrome des habits neufs de l’Empereur », http://users.skynet.be/neurochirurgie.citadelle/habneuf.html (page visitée le 12/09/14.
19 H. C. ANDERSEN,Les Habits neufs de l’Empereur, op. cit.
20 La « performance artistique est un médium ou une tradition artistique interdisciplinaire qui trouve son origine dans des pratiques artistiques d’avant-garde de la première moitié du XXe siècle comme le futurisme, Dada, le surréalisme et l’école du Bauhaus. », https://fr.wikipedia.org/wiki/Performance_%28art%29 (page visitée le 22/09/14).
21 « Selon Duchamp, l’artiste n’est pas un bricoleur et, dans l’art, l’idée prévaut sur la création. Cette conception rejoint celle des grands artistes de la Renaissance qui ont élevé la peinture au rang des arts libéraux – telles l’astronomie et les mathématiques – et en particulier Léonard de Vinci qui définissait l’art comme « cosa mentale ». ». V. MORISSET « L’œuvre de Marcel Duchamp » Dossiers Pédagogiques, Centre Georges Pompidou http://www.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-Duchamp/ENS-duchamp.htm (page visitée le 08/03/06)
22 P. AUDI, Créer, Introduction à l’est/éthique, Verdier, 2010.
23 « » Jeunes hommes, mes Prétendants, puisque le divin Odysseus est mort, cessez de hâter mes noces jusqu’à ce que j’aie achevé, pour que mes fils ne restent pas inutiles, ce linceul du héros Laertès, quand la Moire mauvaise, de la mort inexorable l’aura saisi ; afin qu’aucune des femmes Akhaiennes ne puisse me reprocher, devant tout le peuple, qu’un homme qui a possédé tant de biens ait été enseveli sans linceul. » Elle parla ainsi, et notre coeur généreux fut persuadé aussitôt. Et, alors, pendant le jour, elle tissait la grande toile, et, pendant la nuit, ayant allumé les torches, elle la défaisait. » HOMÈRE, Odyssée, chant 24, traduction de Leconte de Lisle, http://philoctetes.free.fr/odchant24.htm (page visitée le 09/09/14).
24 MONTAIGNE, Essais (1588), Livre III, chap. XIII, Gallimard, La Pléiade, p. 1096.
25 C. GRANJA, 26/11/13, Myeurop.info « La crise de la presse écrite est générale en Europe », http://fr.myeurop.info/2013/11/19/la-crise-de-la-presse-crite-est-g-n-rale-en-europe-12582 (page visitée le 12/09/14).
26 T. KHUN, La Structure des révolutions scientifiques, Flammarion, Champs, 2008.
27 « Killer application désigne un programme informatique si attrayant qu’il justifie à lui seul, pour de nombreux consommateurs, l’achat ou l’adoption d’un type particulier d’ordinateur, de console de jeu, de système d’exploitation ou de téléphone mobile1. », https://fr.wikipedia.org/wiki/Killer_application (page visitée le 29/07/14).
28 Qu’un film s’intitule Le professionnel pour raconter l’histoire d’un tueur à gage n’est sans doute pas le fait du hasard. https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Professionnel (page visitée le 29/07/14).
29 Jeff Koons est l’artiste, ex-trader, emblématique de cet achèvement professionnel de l’art dans sa négation. http://www.jeffkoons.com (page visitée le 29/07/14). Lire J. PERL « The Cult of Jeff Koons » www.nybooks.com/articles/archives/2014/sep/25/cult-jeff-koons/ (page visitée le 01/12/14).
30 J. SCHUMPETER, Capitalisme, socialisme et démocratie, Petite Bibliothèque Payot, Paris, 1974, chap. 7, pp. 119-125.
31 P. MEYER, France-Inter, 8 septembre 1999, http://www.dico-citations.com/ce-sont-des-professionnels-qui-ont-construit-le-titanic-et-des-amateurs-l-arche-de-no-meyer-philippe/ (page visitée le 29/07/14).
32 Appellation d’origine anglo-saxonne qui signifie : « Faites le vous-mêmes ». Voir le livre Système DIY. Faire soi-même à l’ère du 2.0 Boîte à outils & catalogue de projets, Éditions Alternatives, sous la direction d’E. DELPRAT, 2013. http://www.editionsalternatives.com/site.php?type=P&id=1168 (page visitée le 13/09/14).
33 Pour reprendre le mot employé par M. de CERTEAU, L’invention du quotidien, 1. arts de faire, Gallimard, Folio, 1990.
34 « […] le devenir qui est donc entrouvert, ou mi-clos, et qui s’ouvre sans cesse, le devenir résume en lui-même cette mystérieuse amphibolie. L’entrouverture peut-elle être vécue autrement que dans une entrevision ? » V. JANKELEVITCH, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1/ La manière et l’occasion, Essais, Seuil, 1980, p. 89.
35 P. VALÉRY, Tel Quel, chap. Rhumbs, Œuvres, tome II, Pléiade, 1960, p. 636.
36 H. BERGSON, L’évolution créatrice, PUF, Paris, 1941, 2006, p. 302.
37 W. GOMBROWICZ, Ferdydurke, introduction à « Philidor Doublé d’enfant », Gallimard Quarto, Paris, 1996, p. 338.
38 B. LATOUR, Enquêtes sur les modes d’existence, Éditions La Découverte, Paris, 2012, p. 133.
39 V. JANKÉLÉVITCH, op. cit. p. 29.
40 J. BEUYS, « J’explore un caractère de champ », catalogue d’exposition Art into Society into Art, Londres, Institute of Contemporary Arts, 1974, p. 48, trad. Martine Passelaigue, cité par C. HARRISON et P. WOOD, Art en théorie 1900 – 1990, Hazan, 1997, p. 985.
41 « L’art brut est un terme inventé par le peintre Jean Dubuffet pour désigner les productions de personnes exemptes de culture artistique ». https://fr.wikipedia.org/wiki/Art_brut (page visitée le 14/09/14).
42 J. DUBUFFET, L’homme du commun à l’épreuve, Gallimard, Paris, 1973, p. 226.
43 Wikipedia, http://www.wikipedia.org (page visitée le 26/09/14).
44 L.A. DAVIS « Tenure awarded based in part on Wikipedia contributions », 06/04/2011 – Wikimedia Community Blog http://blog.wikimedia.org/2011/04/06/tenure-awarded-based-in-part-on-wikipedia-contributions/ Traduction par Don Rico : « Un professeur d’Université titularisé grâce à ses contributions dans Wikipédia ? », http://www.framablog.org/index.php/post/2011/05/18/wikipedia-professeur-universite (pages visitées le 14/09/14).
45 « La neutralité de l’Internet. Un atout pour le développement de l’économie numérique », Rapport du Gouvernement au Parlement établi en application de l’article 33 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique, transcription du 16/07/10, http://www.laquadrature.net/files/Rapport_Net_Neutralite.pdf (page visitée le 28/09/14).
46 S. JOUVAL, « Robert Filliou, artiste relais », Centre Pompidou, Direction de l’action éducative et des publics, avril 2012, http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-filliou/index.html#equivalence (page visitée le 30/08/14).
47 J-P. COMETTI, L’Art sans qualités, Farrago, Tours, 1999.
48 S. JOUVAL, Robert Filliou : Génie sans talent, catalogue de l’exposition, Musée d’art moderne Lille Métropole, 2004.
49 Voir, par exemple, le portail francophone dédié à Linux http://linuxfr.org Pour approfondir la question de l’appellation GNU/Linux : http://www.gnu.org/gnu/linux-and-gnu.fr.html (pages visitées le 28/09/14).
50 « Linux Torvalds Wins Prix Ars Electronica Golden Nica », Linux Today, 29 mai 1999, http://www.linuxtoday.com/news_story.php3?ltsn=1999-05-29-003-05-PS (page visitée le 25/08/14).
51 Car copyleft, sous General Public License, autorisant la copie, la diffusion et la modification sans exclusive https://gnu.org/licenses/gpl.html (page visitée le 28/09/14).
52 Par la « curation », terme employé par les utilisateurs de plateformes 2.0 comme http://storify.com, http://paper.li.com ou encore http://scoop-it.com par exemple.
53 P. LEGENDRE, De la Société comme Texte, Linéaments d’une Anthropologie Dogmatique, Fayard, 2001.
54 J. HUIZINGA, Homo ludens, essai sur la fonction sociale du jeu, Gallimard, Tel, 1988.
55 « L’univers de jeu est le cadre historique, géographique, culturel de la vie des personnages. Il peut s’agir de l’adaptation d’une oeuvre spécifique (tel film, telle bande dessinée, telle série télévisée, tel livre…), d’un genre narratif particulier (le film noir, le western, les BD de super-héros…), d’un cycle de légendes (le mythe arthurien, les contes arabes, les OVNI…), d’une époque historique réelle (la Terre Sainte au temps des Croisades, l’Egypte pharaonique, les Etats Unis modernes…) ou bien être une invention spécifique (l’empire de X, la planète Y, le mystérieux peuple Z…). » T. LABOREY, Définition du jeu de rôle, « Univers de jeu », http://imaginez.net.free.fr/jeu/jdr/definition/p_definition.htm (page visitée le 27/07/14).
56 M. TRICLOT, Philosophie des jeux vidéo, Éditions la Découverte, Zones, Paris, p. 66-67.
57 « Jeu » https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeu#D.C3.A9finition (page visitée le 04/09/14).
58 « Jeu (mécanique) » https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeu_%28m%C3%A9canique%29 (page visitée le 04/09/14).
59 « Le monde n’est qu’une branloire perenne : Toutes choses y branlent sans cesse, la terre, les rochers du Caucase, les pyramides d’Ægypte : et du branle public, et du leur. La constance mesme n’est autre chose qu’un branle plus languissant. Je ne puis asseurer mon object : il va trouble et chancelant, d’une yvresse naturelle. Je le prens en ce poinct, comme il est, en l’instant que je m’amuse à luy. Je ne peinds pas l’estre, je peinds le passage : non un passage d’aage en autre, ou comme dict le peuple, de sept en sept ans, mais de jour en jour, de minute en minute. Il faut accommoder mon histoire à l’heure », MONTAIGNE, op. cit. p. 782.
60 R. CAILLOIS, Des jeux et des hommes, Gallimard, Folio, 1992.
61 J HUIZINGA, op. cit. p. 337.
62 « Jeu de rôle grandeur nature » https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeu_de_r%C3%B4le_grandeur_nature (page visitée le 04/09/14).
63 Eric Zimmerman blog http://ericzimmerman.com (page visitée le 15/09/14).
64 E. ZIMMERMAN, « Manifeste pour un siècle ludique », trad. Florent Maurin http://florentmaurin.com/?p=498 (page visitée le 04/09/14). Texte original E. ZIMMERMAN & H. CHAPLIN, « Manifesto : The 21st Century Will Be Defined By Games », http://kotaku.com/manifesto-the-21st-century-will-be-defined-by-games-1275355204 (page visitée le 04/09/14).
65 D. COMMELLIAS, « Le succès des newsgames : quand l’info devient un jeu », Les Inrockuptibles, 13/09/14, http://www.lesinrocks.com/2014/09/13/medias/succes-newsgames-linfo-devient-jeu-11524182/ (page visitée le 14/09/14). Voir aussi : « Why We Decided to Gamify Investigative Journalism at Al Jazeera », https://medium.com/@julianaruhfus/pushing-the-boundaries-of-news-why-we-decided-to-gamify-investigations-and-current-affairs-db6b13d64a46 avec le news-game « Pirate Fishing » http://www.aljazeera.com/piratefishing ou encore : « La Syrie comme si vous y étiez : faire du journalisme avec la réalité virtuelle » http://rue89.nouvelobs.com/rue89-culture/2014/09/29/syrie-comme-si-y-etiez-faire-journalisme-realite-virtuelle-255153 & http://www.immersivejournalism.com/project-syria-premieres-at-the-world-economic-forum/ (pages visitées le 24/11/14).
66 F. MAURIN, cité par D. COMMELLIAS, Idem.
67 Comme le montre, avec le miroir de l’art contemporain A. DANTO, L’art contemporain et la clôture de l’histoire, Seuil, 2000.
68 « Une fiction juridique est un concept juridique, défini par Rudolf von Jhering» […] https://fr.wikipedia.org/wiki/Fiction_juridique (page visitée le 10/10/14).
69 J-M. SCHAEFFER, Pourquoi la fiction ?, Paris, Seuil, 1999, p. 199.
70 « Narration transmédia », https://fr.wikipedia.org/wiki/Narration_transm%C3%A9dia (page visitée le 05/09/14).
71 H. JENKINS, « Transmedia Storytelling », Technology Review, 15 janvier 2003 http://www.technologyreview.com/news/401760/transmedia-storytelling/ (page visitée le 20/09/14).
72 « Provost’s Professor of Communication, Journalism, and Cinematic Arts à l’University of Southern California (USC) », https://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_Jenkins (page visitée le 02/12/14).
73 R. BARTHES, « La mort de l’Auteur », Le bruissement de la langue, Seuil, 1984, p.
74 Terme autrement connu par son équivalent anglo-saxon de « Gameplay » https://fr.wikipedia.org/wiki/Gameplay (page visitée le 20/09/14).
75 Autrement dit une histoire qui se joue et qui, par son propre jeu, devient une histoire.
76 N. SARRAUTE, L’ère du soupçon, Gallimard, Folio, 1987. Voir également P. RICŒUR, De l’interprétation, Seuil, Points Essais, 1995, où l’auteur qualifie Marx, Nietzsche et Freud de « maîtres du soupçon ».
77 «Alt-Minds : un rêve transmedia bien réel. », http://live.orange.com/alt-minds-transmedia-fiction La vidéo de présentation http://www.dailymotion.com/video/xrtode_alt-minds-trailer-1-vf_videogames Lire également le retour d’expérience d’Eric Viennot : http://cinemadocumentaire.wordpress.com/2013/07/02/alt-minds-retour-dexperience-avec-eric-viennot/ (pages visitées le 08/09/14).
78 Pour Alternate Reality Game : jeu en réalité alterné. https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeu_en_r%C3%A9alit%C3%A9_altern%C3%A9e (page visitée le 20/09/14).
79 J. BAUDRILLARD, La Guerre du Golfe n’a pas eu lieu, Galilée, 1991.
80 M. DUCHAMP, Duchamp Du signe, écrits, Flammarion, 1975, p. 247.
81 C’est-à-dire au sens fort de la conaissance : ils naissent avec, cette connaissance est une co-naissance. Ce savoir qui est un vivre.
82 La manière dont les êtres (ontos) apparaissent (phaïnô). S. VIAL, L’être et l’écran. Comme le numérique change la perception, PUF, 2013.
83 S. VIAL, op. cit., pp. 182 et 183.
84 Parmi les web-documentaires les plus aboutis nous pouvons citer Prison Valley de David Dufresne http://prisonvalley.arte.tv ; Alma de Miquel Dewever-Plana & Isabelle Fougère http://alma.arte.tv/fr ou encore Journaux intimes de la révolution de Caroline Donati & Carine Lefebvre-Quenneli http://syria.arte.tv (pages visitées le 06/09/14).
85 E. WEIL, Logique de la philosophie, Vrin, Paris, 2000, p. 338.
86 P. LEGENDRE, Ce que l’Occident ne voit pas de l’Occident, Mille et une nuits, 2004-2008, p. 93.
87 Produits et Services Multimédia http://psm-serv.pu-pm.univ-fcomte.fr/ (page visitée le 20/09/14).
88 Paléo-Pablo http://paleopablo.fr (page visitée le 06/09/14).
89 J. GONZALVEZ, « Reconstituer Pablo », Est-Républicain, 04/03/2013, http://sphotos-g.ak.fbcdn.net/hphotos-ak-xaf1/t31.0-8/1966350_292635124221267_1918785210_o.jpg
90 France 3 Franche-Comté « À qui sont ces os ? », 05/03/14, http://france3-regions.francetvinfo.fr/franche-comte/2014/03/05/montbeliard-qui-sont-ces-os-427629.html (page visitée le 06/09/14).